Sprint final
920 km. C'est la distance qui nous sépare maintenant de Québec et nous avons bien l'intention d'y arriver pour le 17 août, parce que Louis a promis à sa blonde qu'il arriverait pour souper. Après avoir pris une journée de congé à Rouyn (où nous avons rencontré les amis et la famille de Louis), nous nous sentons bien reposés, sauf Audrée, qui sent que ses muscles bénéficieraient bien d'une journée supplémentaire... c'est pourquoi elle décide de prendre une journée d'avance et d'attendre les autres à l'entré du parc de la Vérendrye, quelque 150 km plus loin, au motel. Chantal et sa mère se rendent à Ottawa le jour même et l'y emmènent donc très gentiment, où elle en profite pour dormir, dormir et dormir.
Pendant ce temps, nos trois autres joyeux lurons font les 150 km en une vitesse record, quittant vers midi et arrivant au motel à 20h. Nous dormons très bien au motel où il n'y a pas d'eau potable et, se fiant sur Jessy pour nous réveiller le lendemain (il n'y a ni cadran ni téléphone dans la chambre), nous constatons son immense faillabilité et nous levons finalement à 10h. Nous oublions immédiatement nos espoirs de nous rendre à Grands-Remous et décidons plutôt de parcourir les 135 km nécessaires avant d'arriver au Domaine, seul endroit où nous pouvons dormir dans le parc.
Après avoir acheté de la glace et de l'eau en quantité suffisante pour remplir toutes nos gourdes, nous partons finalement, midi passé, vers le Domaine. 1 heure plus tard et Jessy a déjà faim, nous arrêtons donc prendre notre première pause de la journée, qui s'annonce difficile, vus l'état de la route et les milliards de vallons. « Ce ne sont pas des côtes, seulement des vallons », de nous répéter Louis, mais voilà, nous ne nous attendions pas à ce qu'ils soient aussi fréquents et vers le haut! Louis subit donc toute la journée l'assaut de notre mauvaise humeur, lui qui nous avait promis « de gentils vallons souriants »... Mais voilà, gare à vous cyclistes d'expérience : le chemin parcouru dépend de celui qui le parcourt, n'allez donc jamais promettre de la facilité, car vous le paierez bien cher! De plus, dès l'entrée dans le parc, l'accotement est cauchemardesque vue la présence de craques disposées régulièrement tous les 30 cm et qui font regretter l'aluminium. (Le postérieur d'Audrée, acier et selle Brooks aidant, ne s'en sent pas trop mal, mais les mains sentent bien tous les chocs, merci au guidon en alu).
Finalement, l'état de la route s'améliore et l'accotement mesurant environ 1,5 m de large nous emballe. Fidèles à nos nouvelles habitudes, nous arrivons bien après le coucher du soleil au Domaine, où la pire chambre du voyage nous attend. Pas d'air climatisé, de circulation d'air, d'oreiller pour tout le monde et seulement un lit double, l'autre étant simple. Anne et Audrée, sous prétexte qu'elles sont plus petites, se partagent donc le lit simple et Anne dort avec une couverture en guise d'oreiller.
Le lendemain, nous voilà repartis vers Nominingue, qui se trouve sur le petit train du Nord, dont Louis nous a vanté les mérites. Supposément très plat, c'est tout de même avec de plus en plus de doute que nous croyons les promesses de Louis, et commençons à nous imaginer le « col du Train du Nord », puisque les Laurentides, eh bien ce n'est pas plat, de nous jurer la madame du restaurant du Domaine. Louis, fatigué de nous attendre chialer et lui reprocher jusqu'à la température et le sens du vent, s'improvise météorologue et utilise la tactique de nous promettre des cols et des montées tout le temps. Ça fonctionne, puisque nous ne nous apercevons même pas que nous montons une côte de 6% sur 3 kilomètres (je n'y crois toujours pas, la pancarte a dû se tromper!)
Arrivés à Grands-Remous, nous constatons que la civilisation pleut et qu'il n'y a plus un kilomètre sans qu'il y ait de la vie quelque part! Oh mais quelle délice que de retrouver enfin de la vie, des guichets Desjardins et des dépanneurs (où on vend de la bière)! Jusqu'à Mont-Laurier, voilà que le chemin se corse et les montagnes des Laurentides commencent à annoncer leur arrivée. Après quelques bons « vallons » pendant 30 km, nous voilà donc à 110 km du Domaine, à 18h, à Mont-Laurier, où nous nous arrêtons prendre une pause au McDonald's, juste avant d'embarquer sur le mythique « P'tit train du Nord ». 19h déjà et 50 km à parcourir. Le soleil se couche maintenant très tôt (20h15) et nous aurons probablement à sortir nos lampes frontales, encore une fois.
Bien qu'habitués, rouler en pleine forêt, ça fait peur aux filles et elles insistent pour que nous chantions des chansons gaies. 15 minutes de Frère Jacques en canon et ça fait déjà long. Tout de même, nous arrivons, vers 20h30, à Lac-Saguay, 15 km avant Nominingue, où le motel de l'Ours Bleu nous interpelle. La dame de la réception nous informe que c'est très cher (135$), il n'y a que 20 minutes d'internet basse vitesse et lorsque nous lui demandons si nous pouvons entrer les vélos dans la chambre, non seulement refuse-t-elle, mais nous offre de les rentrer dans le sous-sol pour un supplément de 10$! Considérant qu'il s'agit là de la pire offre jamais faite, nous décidons de nous rendre à Nominingue.
Arrivés à l'auberge de la vieille gare, dans la petite ville de Nominingue (un établissement certifié Bienvenue cyclistes!), nous apprenons que nous sommes bien chanceux, car tout dans la ville est plein, mais il leur reste une chambre à deux lits doubles, que nous payons 120$ tx. incluses, où les lits sont plus confortables que dans nos rêves les plus fous. Nous bénissons cet endroit (où nos vélos sont en sécurité dans une pièce prévue à cet effet, gratuitement) et dormons comme des bûches. (Ah et l'internet fonctionne à merveille!)